L'église Notre-Dame-de-l'Assomption, communément appelée "Notre-Dame du Valentin" en raison de son implantation, est construite entre 1832 et 1835 par Henri Perregaux, l'un des plus importants architectes vaudois de la première moitié du XXe siècle (Bissegger, 2007). Il s'agit de la première église catholique construite à Lausanne depuis la Réforme. Cette construction, qui se déroule plus de vingt après l'établissement de la loi de 1810 autorisant l'exercice du culte catholique en terre vaudoise, doit beaucoup à la baronne Marie-Éléonore d'Olcah, figure militante ayant favorisé le rétablissement du culte catholique à Lausanne, établie dans le chef-lieu vaudois en 1792 après avoir fui la révolution française (Secrétan, 2005, p. 121-124).
Près de 100 ans après sa consécration, au début des années vingt, le Conseil de paroisse prépare la rénovation de Notre-Dame, pour laquelle un fonds spécial est créé. Ces travaux devaient à l'origine se limiter à la réfection du choeur et des voûtes de la nef, des façades et du mobilier, ainsi qu'à la construction de nouveaux magasins en bordure de la rue du Valentin (Procès-verbal de la séance du Conseil de paroisse, 1927). Confié à l'architecte du Groupe de Saint-Luc Fernand Dumas, ce travail va prendre des proportions beaucoup plus grandes, jusqu'à transformer radicalement l'apparence et la visibilité de l'édifice de 1830, volontairement discret. Par la construction d'un clocher de 32 mètres de haut, d'un escalier monumental ouvrant directement sur la rue du Valentin et d'un imposant péristyle à l'entrée, Dumas affirme fièrement la présence de la première église des catholiques lausannois ainsi que sa modernité, l'inscrivant au sein d'une véritable petite enclave urbaine composée de magasins, d'écoles catholiques et de nouveaux immeubles d'habitation. Les travaux de cette "Cité paroissiale", commencés en août 1931, démarrent par le réaménagement de la parcelle et par la démolition de l'ancienne façade de l'église dans le but de rallonger l'édifice, puis par la construction de l'escalier et des magasins. La tour du clocher en béton armé est édifiée en dix jours, en automne 1932, et le baptistère à la fin de l'année ; les nouvelles tribunes en mars 1933 et les sacristies en mai (Mauvais, 1931-1934).
Cette rénovation s'accompagne également d'un important programme de décoration, confié à l'artiste Gino Severini entre le printemps 1933 et l'été 1934. Il est choisi à la suite d'un petit concours non-officiel qui rassemble quelques artistes du Groupe romand de Saint-Luc en mai 1933 (Spectateur romand, 1933, p. 67). On peut supposer que Fernand Dumas avait déjà dans l'idée de faire appel au Toscan, qui travaille alors à la décoration de l'église Saint-Pierre de Fribourg dont il avait également remporté le concours (Rudaz, 2008). Auteur d'une importante peinture murale déployant une riche iconographie mariale dans le choeur, l'artiste conçoit également la nouvelle polychromie de l'édifice, pensée afin de créer une harmonie entre ses différentes parties, dans une démarche qui caractérise les réalisations du Groupe de Saint-Luc. Les nouveaux vitraux s'inscrivent dans cette vision. Ceux-ci sont confiés à l’artiste Alexandre Cingria, qui réalise en collaboration avec l’atelier Chiara de Lausanne les neuf verrières des lunettes hautes de la nef et du chœur. Ce programme aurait dû être poursuivi par Cingria dans la nef et le vestibule par des vitraux figurés avec des bustes de saints. Faute de moyens financiers, Cingria n’obtiendra finalement, en 1941, que la réalisation de la rose de la tribune des chanteurs, sur le thème de saint Nicolas de Flüe. En 1952, Paul Monnier, membre du Groupe romand de Saint-Luc, conçoit la rose de la tribune des orgues, plaçant au centre de sa composition la Vierge qui répond aux peintures de Severini dans le choeur.
La nef ne recevra de nouveaux vitraux, non-figuratifs, qu’en 1976-1977, lors de la grande rénovation de l’église où l’artiste natif de Lausanne, Pierre Estoppey, reçoit le mandat de la nouvelle décoration intérieure. Les anciens vitraux ornementaux, datant de 1887 et provenant d'un atelier zurichois, sont alors déposés (Ackermann, 2021, p. 9). A cette occasion, l'intérieur de l'édifice est transformé afin de l'adapter à la nouvelle conception de la liturgie catholique dans les suites du Concile de Vatican II. Le baptistère de Dumas et Severini est supprimé, et l'ancien dallage de la nef recouvert par un nouveau pavement. Durant ces travaux, entrepris sous la direction de l'architecte Jean-Pierre Fragnière entre 1975 et 1977, la peinture murale de Severini est également restaurée ("Valentin nouveau", 1977).
Élevée au rang de basilique mineure en 1992, elle est classée Monument historique en 2003 (Biéler, 2003). Deux nouvelles phases de restauration de l'enveloppe extérieure sont entreprises par le bureau de Christophe Amsler à Lausanne entre 2006 et 2011, et une dernière étape pour la restauration intérieure sera menée entre 2021 et 2023-24, dont l'objectif est de faire cohabiter les trois grandes époques de l'histoire de la basilique. A cette occasion, les décors réalisés dans les bas-côtés par Severini seront rétablis, ainsi que le pavement de 1935 (Noverraz, D'Ayala Valva, Kimmeier, 2021). La peinture murale de Severini de l'abside, étudiée dans le cadre d'un projet FNS coordonné par la SUPSI en 2020 (Gammaldi, Luppichini, Moretti, Piqué, 2020 ; D'Ayala Valva, Noverraz, 2021), a été restaurée par l'atelier Saint-Dismas entre 2020 et 2022.
Ackermann, I. (2012, août). La basilique Notre-Dame du Valentin : Evolution de l'intérieur de l'église depuis la seconde moitié du 19e siècle jusqu'à [nos jours]. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.
Biéler, P. (2003, 14 février). Décision du 14 février 2003 classant la basilique Notre-Dame du Valentin, à Lausanne. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.
Bissegger, P. (2007). D'ivoire et de marbre: Alexandre et Henri Perregaux ou l'âge d'or de l'architecture vaudoise, 1770-1850. Lausanne, Suisse : Bibliothèque historique vaudoise.
D'Ayala Valva, M., Noverraz, C. (2022). Gino Severini’s encounter with the Groupe de Saint-Luc in Switzerland and his path towards «despoliation», 1923-1947. Studi di Memofonte, (29), 79-129.
Gammaldi, N., Luppichini, S., Moretti, P., Piqué, F. (2020, 12 novembre). Peinture murale de Gino Severini, 1933-1934 : Basilique Notre-Dame, Lausanne. Rapport technique sur l'état de conservation. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.
Mauvais, J. (1931-1934). Transformations à la Cité paroissiale du Valentin 1931-1934 [journal des travaux]. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.
Noverraz, C., D'Ayala Valva, M., Kimmeier, S. (2021, août). Gino Severini à Lausanne, une "peinture qui réveille le mur". A Suivre (83), 3-7.
Protocole de la séance du Conseil de paroisse. (1927, 4 mai). Dans cahier : Conseil de fabrique de la Paroisse catholique de Lausanne : Procès-verbaux 1912-1927. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.
Rudaz, P. (2008, octobre). Un concours de circonstances pour un décor haut en couleur. L'Eglise Saint-Pierre, Patrimoine fribourgeois, (18), 30-37.
Secrétan, B. (2005). Église et vie catholiques à Lausanne du XIXe siècle à nos jours. Lausanne : Bibliothèque historique vaudoise.
Spectateur romand [Alexandre Cingria]. (1933). Chronique du Spectateur romand. Ars sacra, 62-68.
Valentin nouveau. (1977, avril). Bulletin paroissial [Plaquette publiée à l'occasion de la restauration de l'église]. Archives de la paroisse Notre-Dame de Lausanne, Suisse.