Provenant de la collection T. Anstey Guthrie dont l’ensemble a été légué au Victoria and Albert Museum en 1934, le vitrail, qui est dans un mauvais état de conservation, était considéré lors de son entrée dans les collections comme suisse et daté de 1544, comme indiqué sur le cartouche inférieur (V&A, documentation, état du 20 décembre 2013 ; sur le legs, voir ibid., inv. C.73-1934).
Aucun modèle peint, dessiné ou gravé du Couronnement de la Vierge par la Trinitié n’a été identifié, bien qu’il existe un vitrail qui semble partager une même invention, attribué à Carl von Egeri et aujourd’hui conservé au Musée Ariana à Genève (inv. AD 8593). Selon Paul Boesch, les deux saints non identifiés, représentés aux côtés de saint Pierre et saint Paul, pourraient en revanche correspondre à Gall et Othmar, les saints patrons de Saint-Gall (ibid.).
En 1952, Boesch porta en effet une attention particulière à ce vitrail qui, selon ce dernier, serait le plus ancien conservé de la région de Toggenbourg, située dans le canton de Saint-Gall. Cette hypothèse repose sur la date de 1544 d’une part et, d’autre part, sur l’origine du religieux dont l’une des branches du patronyme Eichhorn provient de Lichtensteig, ville et commune qui se situe précisément dans la région de Toggenbourg (Zürcher 1926, p. 4 ; V&A, documentation, état du 20 décembre 2013).
Né à Wil (SG) vers 1515 et mort à Wettingen (AG) le 17 juin 1563, enterré à Einsiedeln (SZ), chapelle des Grâces, Peter Eichhorn est le fils de Heinrich Eichhorn d'Amlikon (TG) et le frère de Joachim Eichhorn, prince-abbé d’Einsiedeln de 1544 à 1569. Profès à l'abbaye bénédictine de Saint-Gall (1533), prêtre (1536), économe (1542) puis doyen (1547), Peter Eichhorn fut placé à la tête de l'abbaye cistercienne de Wettingen (AG) en 1550 par les huit cantons catholiques, sur proposition du bailli Aegidius Tschudi (1505-1572) ; l'abbé général de l'ordre n'approuva cette élection qu'après intervention du roi de France Henri II. Peter Eichhorn réussit à réformer le couvent (auquel fut incorporé en 1557 celui de Sion près de Klingnau) (Wohler 2004, consulté le 16 février 2021). Cette identification est confortée par le cartouche et les armoiries.
L’emplacement d’origine de ce vitrail n’est pas établi, bien que l’une des institutions susmentionnées se présente comme autant de potentiels candidats.
Peter Eichhorn apparaît en qualité de donateur de nombreux vitraux de l’époque, commandés à des peintres-verriers tels que Carl von Egeri ou Niklaus Bluntschli. En 1952, Paul Boesch attribue cependant le panneau de Londres au peintre-verrier Caspar Stilhart de Constance, mort en 1548 (V&A, documentation, état du 20 décembre 2013).
On retrouve une palette proche, des puttis semblables ou encore certains motifs décoratifs dans certains vitraux attribués à ce dernier, comme dans le vitrail héraldique aux armes de Ludwig von Ulm et Margaretha Muntprat, daté de 1542 et aujourd’hui conservé au Historisches Museum Thurgau, ou encore celui aux armes de Thomas et Christoph Zollikofer, daté de 1543 et conservé au château de Altenklingen (cf. Hasler et Keller 2020, TG_172 et TG_287, consulté le 16 février 2021), tandis que le motif des colonnes carrées pourvues de niches occupées par des saints semble caractéristique de cet artiste, comme le rappelle le vitrail figuratif aux armes de même Peter Eichhorn réalisé peu après pour l’abbaye cistercienne de Wettingen (AG, Nord Va – cf. Hoegger 2002, p. 259-260).