Name

Eglise Saint-Michel

Address
Route principale 85
1642 Sorens
Geographical Hierarchy
Coordinates (WGS 84)
Author and Date of Entry
Valérie Sauterel 2024
Information about the Building

A l’origine, Sorens faisait partie de la commune de Vuippens, et possédait une chapelle médiévale dédiée à Saint-Michel, rebâtie en 1743. En 1861, le village est érigé en paroisse après la destruction par le feu de l’église de Vuippens, et sa chapelle est agrandie afin de servir d’église paroissiale (Torche, 2008, p. 392-393). Au début des années 1920, avec l’augmentation de la population, sa capacité devient insuffisante (Terrapon, 1935, p. 158). Le curé Terrapon, dès sa nomination en 1920, entreprend des collectes chaque dimanche pour la construction d’une nouvelle église. Lors des visites pastorales de 1922 et 1929, l'évêque Mgr Marius Besson insiste sur la nécessité de construire un nouveau sanctuaire, mais rencontre une grande résistance au sein du conseil paroissial. Avec le temps, Terrapon obtient l'autorisation de demander à l’architecte phare du Groupe de Saint-Luc, Fernand Dumas, un projet sans engagement. Convaincue que seul Dumas peut bâtir une église à des conditions favorables, la paroisse n’a jamais songé à ouvrir un concours d'architecture (Terrapon, 1935, p. 161, 165). L’architecte conçoit un projet qu’il présente au conseil de paroisse avant Pâques 1933. Terrapon soumet la maquette à Besson qui en est enchanté et ensuite la présente aux paroissiens en leur annonçant que le budget ne s’élèvera pas à plus de 200'000 francs. L'assemblée paroissiale vote finalement en faveur de la construction de la nouvelle église, le fonds de construction s'élevant alors à 135'000 francs (Terrapon, 1935, p. 166, 169-170). Le contrat entre la paroisse et Dumas est signé le 11 juin 1933 : le devis comprend les travaux extérieurs et le chauffage central mais pas les orgues, ni les cloches, ni les vitraux, les travaux d'art et les honoraires de l'architecte. La commune de Sorens est sollicitée par la paroisse pour fournir le sable, le gravier et le bois. La bénédiction de la première pierre a lieu le 7 mai 1934 (Terrapon, 1935, 171, p. 206).

La mise en chantier est laborieuse, jalonnée de querelles avec les propriétaires des terrains sur lesquels elle devait être bâtie. Le gros œuvre est achevé en octobre 1934. Le curé Terrapon doit demander plusieurs fois de l’aide à l’évêché, car l’argent manque pour achever la construction. Un compromis est finalement trouvé face aux demandes répétées du curé, et l’évêché s’engage à verser un subside annuel. La consécration de l’église par Mgr Besson a lieu le 8 octobre 1935. Dès 1937, des problèmes apparaissent dans le financement de la dette et provoquent des tensions entre le curé et les paroissiens. Pour mettre fin à cette situation, Terrapon publie le 20 octobre 1937 les comptes de construction de l’église, où il salue le respect des engagements de la part de l’architecte. La tension ne s’apaisant cependant pas, il est déplacé dans une autre paroisse (Torche-Julmy, 2008, p. 394, 395).

Pour cette église, Dumas opte pour un plan basilical avec deux collatéraux séparés de la nef par des arcades, alors que la sacristie est à gauche du chœur et la chapelle de la Vierge à droite. Le baptistère est de plan carré, surmonté d’une coupole, en face de l’entrée et séparé par un vestibule (Torche-Julmy, 2008, p. 395). Il est désaffecté et transformé en 1985 en chapelle mortuaire, incluant le mur nord du porche couvert sur lequel se situaient les dalles de verre d'Alexandre Cingria (Noverraz, Sauterel, Wolf, 2021, p. 52). Le clocher situé à l’angle nord-est de l’édifice est hors-œuvre et lié à la sacristie par un promenoir (Lauper, 2012, p. 120). Dumas aime donner un aspect spécifique à chacune de ses églises, en développant une matière dont il exploite les caractéristiques sous plusieurs formes (Torche, Majetti, James, 2005, p. 63). A Sorens, il choisit comme matériau central le bois, qu’il emploie pour la construction de la charpente, les autels, les retables, la chaire, le chemin de croix et l’ensemble du mobilier et des objets liturgiques. Il sélectionne le noyer pour le mobilier, les autels et objets décoratifs ou utilitaires et utilise d’autres bois indigènes comme le frêne, le platane, l’érable plan et le cerisier pour le reste des équipements. Pour les plafonds et les éléments structurels peints ou invisibles, il opte sans doute pour un bois moins coûteux (Torche-Julmy, 2008, p. 396-397).

Un concours est lancé pour la décoration intérieure et la polychromie de l’église. Y participent, outre Cingria, le Vaudois Albert Gaeng et le Fribourgeois Willy Jordan, qui sort gagnant. Il collabore avec Jacqueline Esseiva, qui réalise pour la chapelle de la Vierge les peintures des caissons hexagonaux du plafond, les trois motifs de l'antependium de l'autel ainsi que les teintes de l'encadrement du retable. Elle étudie aussi l'harmonie des teintes de la nef avec Jordan (Terrapon, 1935, p. 219-221), qui se charge de la polychromie intérieure, de la marqueterie de la paroi-retable du chevet illustrant l’archange Michel terrassant le dragon, ainsi que des marqueteries de la chair et de la tribune. Il crée également des ornements et vêtements liturgiques (Jordan, 1958, p. 5). Le retable du chœur, pièce centrale de l’église, n’est pas encore terminé lors de la consécration de l’église. Composé de trente-sept essences de bois différentes, il est réalisé par la maison Georges Bauder de Stuttgart et mis en cadre et monté par les ateliers Held de Montreux (Terrapon, 1935, p. 219).

Cingria, à défaut d’être le gagnant du concours pour la décoration, se voit confier la réalisation de l’ensemble des vitraux de l’église, qu’il réalise en collaboration avec l’atelier Chiara de Lausanne (Chiara, 1935). Il collabore également avec l’atelier Gaudin de Paris pour les dalles de verre disposées sur le mur nord du porche couvert (Gaudin, 1935). François Baud exécute les panneaux de chêne sculptés encadrant la grande porte, compose les lampes, les porte-cierges ainsi que les bénitiers en céramique de l’entrée (Terrapon, 1935, p. 214, 215). Marcel Feuillat réalise le serpent ornant la cuvette du baptistère, la porte du tabernacle ainsi que son crucifix, tout comme la plaque en bronze représentant le lavement des pieds derrière le lavabo de la sacristie. Emilio Berretta obtient la création du chemin de croix, qu’il effectue en plusieurs étapes au fur et à mesure de l’arrivée des dons après l'inauguration en octobre 1935, date à laquelle seule une station était achevée (Terrapon, 1935, p. 223). Il imagine des marqueteries très originales faites de bois et d’aluminium, réalisées par Otto Weber, qui sont intégrées directement dans les lambris en bois du mur. Pour la chapelle de la Vierge, Baud conçoit un retable en bois avec des scènes de la vie de la Vierge encadrant une statue de la Vierge à l’enfant de la sculptrice Elisabeth Pattay-Python (Lauper, 2012, p. 120), polychromée par Jordan (Jordan, 1935, 23 décembre).

La polychromie du chœur et de la nef a été modifiée ultérieurement pour éclaircir l’intérieur du sanctuaire (Torche-Julmy, 2008, p. 395).

Literature

Chiara, P. (1935, 31 août). [Facture]. Archives de la paroisse de Sorens, Suisse.

Gaudin, P. (1935, 6 novembre). Mémoire. Archives de la paroisse de Sorens, Suisse.

Jordan, W. (1935, 23 décembre). [Facture]. Archives de la paroisse de Sorens, Suisse.

Jordan, A. (1958, novembre). Renseignements s/ W. Jordan [texte biographique]. Archives privées Ariane Bercher-Jordan.

Lauper, A. (2012). Sorens. Dans Société d’histoire de l’art en Suisse (dir.), Guide artistique de la Suisse (tome 4b, p. 119-120). Berne, Suisse : Société d’histoire de l’art en Suisse.

Noverraz, C., Sauterel, V., Wolf, S. (2021). De béton et de verre. La dalle de verre et ses premières utilisations en Suisse. Les Cahiers vaudois, (11), 50-59.

Terrapon, J. (1934, 26 janvier). [Lettre à Mgr Marius Besson]. Archives de la paroisse de Sorens, Suisse.

Terrapon, J. (1935, 27 avril). Un curé parmi les autres [document autobiographique inédit]. Archives de l’Evêché Fribourg (AEvF), Suisse.

Torche-Julmy, M.-T. (2008). L’église de Sorens et sa décoration de bois. Dans Lüthi, D. et Bock, N. (dir.). Petit précis patrimonial : 23 études d’histoire de l’art offertes à Gaëtan Cassina (p. 389-404). Lausanne, Suisse : Edimento.

Torche-Julmy, M.-T., Maggetti, M. et James, J. (2003). L’église d’Orsonnens, son décor et sa restauration. Patrimoine fribourgeois, (15), 56-64.

Waeber, L. et Schuwey, A. (1957). Églises et chapelles du canton de Fribourg. Fribourg, Suisse : Saint-Paul.