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MP_01.55: Abraham et Isaac
(FR_Romont_VCR_MP_01.55)

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Titre

Abraham et Isaac

Type d'objet
Artiste
Datation
1924
Dimensions
26.5 x 21 (support), 25.5 x 13 cm (sujet)

Iconographie

Description

Abraham en pied, un couteau à la main, s'apprêtant à sacrifier Isaac agenouillé, les bras croisés devant la poitrine. En arrière-plan, un paysage exotique.
Au verso : trois esquisses d'homme accompagnées de l'inscription "Don Quichotte"

Code Iconclass
71C131 · le sacrifice d'Isaac (Genèse 22)
Mot-clés Iconclass
Inscription

Don Quichotte (au verso)

Signature

Aucune

Technique / Etat

Etat de conservation et restaurations

Taches brunes en haut

Technique

Encre de chine

Historique de l'oeuvre

Recherche

Ce travail préparatoire a été réalisé en 1924 par l’artiste Marcel Poncet dans le cadre de la commande de trois vitraux pour la tribune des orgues de l'église Saint-Paul de Cologny (GE), représentant Melchisedech (GE_08.21), Moïse (GE_08.22) et David (GE_08.23).
Il s’agit de la troisième réalisation de l’artiste dans l’édifice, puisqu’il a déjà conçu, en 1914 et 1915, un vitrail pour la porte d’entrée de l’église (GE_08.07) et trois vitraux dans les bas-côtés de la nef (GE_01.10 ; GE_01.11 ; GE_01.12), sa première grande commande après sa sortie de l’école des Beaux-Arts. Ayant suivi en parallèle une formation pratique au sein de l'atelier du peintre-verrier et restaurateur de vitraux Gérard Krachten à Carouge, où il apprend les techniques de fabrication du vitrail (Reymond, 1992, p. 37 ; Dumaret, 2009, p. 195), Poncet ouvre un premier atelier en 1915, où il est en mesure de réaliser ses propres vitraux mais aussi ceux d’autres artistes (Reymond, 1992, p. 37-38). Souhaitant maîtriser l’ensemble du processus créatif lui-même, il est l’un des rares artistes à présenter la particularité d’être à la fois peintre-verrier et maître-verrier, ce qui est probablement un atout indéniable aux yeux des commanditaires de l’église Saint-Paul. Entre 1915 et 1922, il assure ainsi la conception des verrières dessinées par Charles-Emile Brunner (par exemple GE_08.01) et Alexandre Cingria (GE_08.04) dans les bas-côtés, ainsi que les fenêtres hautes de Maurice Denis avec son collaborateur Charles Wasem (par exemple GE_08.19) (Sauterel, 2008, p. 236-242).
A Saint-Paul, comme de manière générale pour l'ensemble des vitraux qu'il réalise durant sa carrière, Poncet prépare minutieusement ses projets, comme le prouvent les nombreux travaux préparatoires présents dans le fonds graphique de son atelier, conservé au Vitrocentre Romont. Leur analyse permet de comprendre comment l’artiste procède, depuis les premières esquisses jusqu’à un état abouti de son projet.
Plus de 70 œuvres graphiques peuvent être rattachées aux vitraux de Saint-Paul, et 21 aux vitraux de la tribune. Ces travaux révèlent que Poncet a travaillé un quatrième prophète, Abraham, qui ne fait pas partie du groupe des trois vitraux de la tribune. Une lettre anonyme conservée dans les Archives Poncet au Vitrocentre Romont, datée d’octobre 1924, indique que l'artiste a reçu de la famille Jacquet, les commanditaires, la somme de 2100 francs pour trois vitraux des fenêtres de la façade de l'église (la tribune), et qu'il reste à livrer un quatrième vitrail représentant Abraham, ainsi que deux panneaux décoratifs ("Reçu pour la commande des vitraux de Saint-Paul]", 1924). Cette lettre est cependant fragmentaire, et n'indique pas où devait être placé ce vitrail d'Abraham. Les travaux préparatoires indiquent que ce vitrail a été conçu selon le même schéma que les trois autres, avec un encadrement architectural et un soubassement similaire. Une maquette ([[MP_01.68](/objects/MP_01.68)) montre les quatre verrières côte à côte, comme si elles avaient été prévues pour former un ensemble. Ce vitrail d'Abraham ne semble cependant pas avoir été réalisé, en tout cas pas dans l'église.
L'analyse du fonds graphique indique que l'artiste commence par réfléchir à sa composition en s'inspirant de différentes sources visuelles, à l'instar des ballets russes et Don Quichotte, comme le révèlent les notes accompagnant une des esquisses (MP_01.50). Il envisage trois partis très différents pour son vitrail. Dans le premier, il conçoit sa composition comme une scène narrative illustrant le sacrifice d'Isaac, comme on le constate ici et sur deux autres esquisses (MP_01.54 ; MP_01.51). Parallèlement, il imagine un Abraham en costume de Don Quichotte, poussant devant lui son fils habillé lui aussi à la mode du XVIIème siècle, solution originale que l'on retrouve sur certaines esquisses (MP_01.50 ; MP_01.56 ; MP_01.57), ainsi que sur un carton en couleur (MP_01.72). Enfin, une troisième version montre une représentation plus hiératique du prophète accompagné de son fils, au sein d'un encadrement architectural similaire aux autres vitraux (MP_01.58 ; MP_01.63), composition que l'on retrouve sur la maquette (MP_01.68). Il est toutefois difficile de savoir laquelle de ces trois solutions a été retenue, en supposant que le vitrail a bien été réalisé.
L’art médiéval constitue une de ses sources pour ce cycle, et plus précisément des modèles issus de la sculpture monumentale chartraine. Dans une page de note de sa main liée au cycle des vitraux de la tribune des orgues, Poncet évoque le porche septentrional de Chartres où sont représentés, entre autres, Melchisedech, Abraham, Moise, et David (Poncet, [1924]). Il place ses figures au sein d’un encadrement architectural qui évoque la niche dans laquelle sont placées les statues, de même que le soubassement sur lequel elles reposent. Il leur confère un aspect hiératique et les soumet à une certaine déformation, notamment la partie basse du corps de David, tandis que le traitement en camaïeu avec de forts clairs-obscurs crée un effet de modelé qui évoque la pierre et la sculpture, bien que l’artiste ne cherche pas à créer un trompe-l’œil, ni à estomper l’aspect bidimensionnel de l’ensemble (Noverraz, 2014, p. 43-44).
Lorsqu’il s’occupe des vitraux de la tribune en 1924, Poncet a vécu de nombreuses expériences qui l'ont marqué aussi bien personnellement qu'artistiquement. Dès 1919, il s’est lancé dans trois grandes entreprises qui se sont toutes plus ou moins soldées par des échecs : la fondation, avec Cingria, du Groupe de Saint-Luc et Saint-Maurice, l’ouverture d’une fabrique de verre à vitrail selon les recettes et techniques traditionnelles à Bossey-Veyrier, et la réalisation de son premier vitrail de la cathédrale de Lausanne (Reymond, 1992, p. 46). Le Groupe de Saint-Luc et Saint-Maurice ne décolle jamais véritablement et fait faillite au début de l’année 1924, quelques mois avant de renaître sous une forme différente à travers la Société Saint-Luc (Societas Sancti Lucae) (Noverraz, 2022, p. 35-43), aventure à laquelle Poncet ne participera pas. Par manque de résultats probants, il se voit contraint de fermer en 1922 son usine de verre, financée en partie par Saint-Gobain et dans laquelle il travaillait main dans la main avec Charles Wasem. La même année, éclate le scandale lié à la pose de son vitrail des Quatre évangélistes à la cathédrale de Lausanne, dont la modernité fait polémique, et qui prive l’artiste de la commande de l’ensemble des vitraux de l’édifice (Reymond, 1992, p. 47-55 ; Donche-Gay, 1994, p. 30-46).
Son style a lui aussi évolué. Il a peu à peu abandonné les formes douces et les coloris lumineux qui caractérisent ses vitraux des bas-côtés de la nef de 1915, marqués par l’Art nouveau et le style de Maurice Denis, pour privilégier une touche plus expressive et nerveuse, servie par des coloris plus sombres, traités en camaïeu. On retrouve ces caractéristiques sur des œuvres préparatoires contemporaines des trois vitraux de la tribune de Saint-Paul, réalisées entre 1924 et 1927 pour la verrière de la Crucifixion de la cathédrale de Lausanne, la dernière œuvre qu’il sera autorisé à poser dans l’édifice (voir par exemple MP_02.100 ; MP_02.94). En 1925, l’artiste part s’installer à Paris, où il découvre la gravure, technique qui lui plaît par sa puissance graphique reposant sur l’opposition du noir et du blanc, et qu’il tentera de traduire en vitrail la même année à la chapelle du collège de l’Abbaye de Saint-Maurice (par exemple MP_09.07). Ces différents travaux soulignent la nouvelle direction artistique prise par l’artiste à partir de 1924, et que l’on peut déjà ressentir dans les vitraux de la tribune de Saint-Paul.

Datation
1924
Date d'entrée
1996
Localisations liées
Propriétaire

Gabriel et Antoine Poncet

Bibliographie et sources

Bibliographie

[Reçu pour la commande des vitraux de Saint-Paul]. (1924, 6 octobre). Vitrocentre Romont, Suisse, Archives Marcel Poncet.

Donche-Gay, S. (1994). Les vitraux du XXe siècle de la cathédrale de Lausanne : Bille – Cingria – Clément – Poncet – Ribeaupierre – Rivier, Lausanne, Suisse : Ed. Payot.

Dumaret, I. (2009). KRACHTEN (Gérard, 1863-1944). Dans J.-M. Marquis (dir.), Dictionnaire carougeois : Arts à Carouge : Peintres, sculpteurs et graveurs (tome IV B, p. 195). Carouge, Suisse : Ville de Carouge.

Noverraz, C. (2014). Marcel Poncet (1894-1953) : au coeur de l'oeuvre d'un artiste-verrier [mémoire de master inédit]. Université de Lausanne.

Noverraz, C. (2022). Le Groupe de Saint-Luc (1919-1945) : expression et quête d'identité d'une Société artistique catholique dans l'Europe de l'entre-deux-guerres [thèse de doctorat inédite]. Université de Lausanne.

Poiatti, M. (2001). L’église de Saint-Paul Grange-Canal, Genève (Guides de monuments suisses, 70, 696). Berne : Société d’histoire de l’art en Suisse.

Reymond, V. (1992). Marcel Poncet. Paris, France : Bibliothèque des Arts.

Sauterel, V. (2008). Catalogue raisonné des vitraux de Genève. Dans L. Borel (dir.), Émotion(s) en lumière : le vitrail à Genève (p. 224-375). Genève, Suisse : APAS Association pour la promotion de l'art sacré : La Baconnière Arts.

Informations sur l'image

Nom de l'image
FR_Romont_VCR_MP_01.55
Crédits photographiques
© Vitrocentre Romont
Date de la photographie
2015
Copyright
© Ayants droit
Propriétaire

Gabriel et Antoine Poncet

Inventaire

Numéro de référence
MP_01.55
Auteur·e et date de la notice
Camille Noverraz 2014; Camille Noverraz 2023

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