La provenance de ce vitrail n’est pas documentée. D’après une note conservée à la documentation du Victoria and Albert Museum, il pourrait provenir de Barningham Hall. Avec les VAM C.560 à 570-1921, il a été acheté en 1921 avec le fonds du legs Murray par le Victoria and Albert Museum pour la somme de 500 livres sterling. Lors de son entrée dans les collections du musée, il était considéré comme suisse et daté vers 1600 (V&A, documentation, état du 20 décembre 2013). Il s’agit d’un vitrail historié aux armes absentes.
De grande qualité, ce vitrail, dont l’état de conservation est moyen, représente une scène vétérotestamentaire tirée du Livre de Tobie, à savoir, au premier plan, Tobit aveugle priant pour recouvrir la vue et, au second plan, Sarra insultée par une servante de son père pour avoir tué sept maris puis, selon le procédé de la narration simultanée, Sara priant pour qu’elle puisse être donnée en mariage à Tobie, fils de Tobit (Tb 3, 10-17). Il fait partie d’une série de vitraux historiés qui retracent l’histoire de Tobie et qui furent commandés par la corporation strasbourgeoise „Zum Schöffel“, dont 10 sont conservés au Victoria & Albert Museum (VAM, inv. C.560 à 569-1921 – cf. Rackham 1936, p. 94).
Les modèles graphiques de ces vitraux reviennent au peintre-verrier zurichois Christoph Murer qui réalisa vers 1600 à Zurich une série de dessins avec pour sujet l’histoire de Tobie. Six d’entres deux sont conservés au Kunsthaus de Zurich (Vignau-Wilberg 1982, p. 31-32) et un autre, qui représente l’aveuglement de Tobit et provient de la collection Wyss de Berne, est conservé au British Museum de Londres (inv. 1899,0120.35).
Au début du XVIIe siècle, les modèles dessinés de Murer furent recopiés à plusieurs reprises, notamment par le peintre-verrier Lorenz Lingg (1582-1639). De ce dernier, il existe à la Staatliche Kunsthalle de Francfort-sur-le-Main 11 copies dessinées de l’histoire de Tobie réalisées d’après des modèles de Murer datés de 1607 (Mensger 2012, vol 1, nos 420–430, voir en particulier le no 427). La Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe possède trois autres copies de la série de Lingg, réalisées vraisemblablement après 1607 et probablement dues à une main inconnue de l’atelier strasbourgeois de ce dernier (Mensger 2012, vol. 2, nos 920–922).
Sur cette base et le rapprochement de la composition centrale avec un dessin conservé à la Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe attribué à Lorenz Lingg (cf. Mensger 2012, vol. 2, no 920), le vitrail de Londres peut être attribué à Lorenz Lingg et daté de 1604, à l’instar des autres vitraux de la série pour lesquels les cartouches datés du commanditaire ont été conservés. Cette attribution et datation avaient déjà été proposées en 1952 par Paul Boesch qui rapprocha ce cycle de vitraux du siège de la corporation „Zum Freiburger (Schöffel)“ à Strasbourg (V&A, documentation, état du 20 décembre 2013 ; sur les Lingg, cf. Boesch 1938 ; Mensger 2009 ; Gartenmeister 2019, consulté le 1er décembre 2020).
Christoph Murer a réalisé d’autres scènes tirées du livre de Tobie, à l’instar d’un dessin, daté de 1589 et conservé à la Staatliche Graphische Sammlung de Munich (inv. 40777), qui se présente comme une variation de l’aveuglement de Tobit le Père conservé au British Museum de Londres (cf. Vignau-Wilberg 1982, p. 26, n. 215 ; Hasler 1996/97, vol. 2, p. 198-200, nos 584 et 585 ; Mensger 2012, vol 1, nos 420–430).
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