Comme pour le vitrail de bienvenu aux armes de Rossam Trachsler et Elsbeth Scherer (VAM_65) dont il est le pendant, le Victoria and Albert Museum acheta le vitrail en 1926 chez l’antiquaire Wilfred Drake (1879-1948) avec le fonds du legs Murray. Lors de son entrée dans les collections du musée, il était considéré comme suisse et daté de 1675, comme indiqué sur le cartouche (V&A, documentation, état du 20 décembre 2013).
La mise en page de ce vitrail s’inscrit dans la tradition des vitraux de bienvenu, bien établie dans l’ancienne Confédération suisse. Aucun modèle dessiné n’a cependant été identifié pour la présente composition.
Après l'Antiquité romaine, le XVe siècle connut un nouvel engouement pour les bains, qui ne servaient pas qu'à des fins médicales et d'hygiène : ils avaient aussi une fonction sociale, on y traitait affaires et politique et il n'était pas rare qu'on s'y livrât à la prostitution. Par ailleurs, d'innombrables étuves étaient exploitées dans les villes et villages de l’ancienne Confédération helvétique, sans but thérapeutique ; elles étaient soumises à l'approbation des autorités (cf. „banalités“, Dictionnaire historique de la Suisse). En effet, de nombreuses maisons de bains furent ouvertes ou remises en activité au XVIe siècle, notamment au Gurnigel (1561), à Pfäfers (1629), La Lenk (1689), Gonten (mentionnée en 1597). Konrad Gessner (1553), Kaspar Ambühl (publié en 1574) et Leonhard Thurneysen (1572), entre autres, ont écrit des ouvrages médicaux et scientifiques sur les sources thermales (Reichen 2017, consulté le 24 février 2021).
Les armoiries qui accompagnent le patronyme Trachsler font références aux Trachsler de Nesslau (SG), dans la région du Toggenburg, dans le canton de Saint-Gall, tout comme les Rüdlinger mentionnés dans le panneau de Londres (cf. Boesch 1943, p. 58). Fendrich Hans Wenderl Scherer fut baptisé le 11 juillet 1651 à Nesslau et mourut le 2 janvier 1701 à Lutenwil (SG), à l’âge de 49 ans. Le 1er octobre 1673, il épousa en premières noces Anna Rüdlinger, qui mourut manifestement le 20 décembre 1698. De cette première union naquirent apparemment sept enfants. À sa mort, Fendrich Hans Wenderl Scherer, qualifié de lieutenant, est désigné „relicta coniuge“, ce qui pourrait signifier, selon Paul Boesch, que ce dernier avait dû se remarier (Boesch 1935a, p. 70, no 183).
Le village de Nesslau, avec les fermes et hameaux de Lutenwil, Krümmenschwil, Büel, Schneit, Laad et Schlatt, est situé sur les deux rives de la Thur, entre le Speer et le Stockberg (Büchler 2016, consulté le 24 février 2021). La représentation d’étuves, dans la partie supérieure, fait probablement référence à des bains thermaux qui devaient par conséquent être alimentés par cette dernière. L’emplacement d’origine de ce vitrail n’a cependant pas pu être établi.
La présence du monogramme „HCG“, dans l’angle inférieur droit du cartel, a permis d’attribuer le vitrail de Londres au peintre-verrier saint-gallois Hans Gaspar Gallati, dont Paul Boesch a reconstitué la vie et l’oeuvre (cf. Boesch 1935a ; id. 1954f, p. 76-77).
Boesch signale deux autres vitraux sur lesquels figurent le monogramme „HCG“ ainsi que le patronyme „Scherer“ : le premier, daté de 1675 et précisément conservé au Victoria & Albert Museum, constitue un pendant au présent vitrail (id. 1935b, nos 23 et 24 ; id. 1935a, no 182, soit VAM_65) ; le second, daté de 1680 et conservé au Musée de Cluny, mentionne comme donateurs Johannes Maggion et Maria Lisabet Ruotz, le premier apparaissant aux côtés de celui de „Fändrich Wendel Scherrer im Thurtal“ dans un document d’archives que Boesch date vers 1678 (“Mannschaftsrödel“ – ibid., p. 74, no 195), confortant ainsi l’identification ainsi que l’attribution du panneau de Londres.
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