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Ce carton en couleur est le dessin précis à l’échelle 1:1 pour les deux fenêtres hautes à gauche dans la nef du temple de Coppet : le vitrail de la deuxième ouverture pour la partie basse figurant Adam et Eve et celui de la première pour la partie haute présentant l’agneau et le lion.
La comparaison de ce carton avec le vitrail dans le sanctuaire nous permet de constater que le quadrilobe au-dessus des deux lancettes a été inversé avec celui du vitrail d’à côté. En effet, le lion et l’agneau figurent au-dessus d’Adam et Eve dans le jardin d’Eden et Eve naissant de la côte d’Adam. Par contre les deux écoinçons sous le quadrilobe sont restés à leur place. Ce changement d’image est étrange car les motifs dans les écoinçons complétaient ceux représentés dans le quadrilobe figuré au-dessus et auraient dû logiquement également être intervertis. Que signifie donc ce changement partiel ? Comment peut-on l’expliquer ? Peut-être est-ce une volonté de dernière minute des commanditaires ? Ou une erreur dans le montage des vitraux ? Il est difficile de donner une réponse claire.
Dans le fonds Charles Clément donné au Vitromusée Romont en 1995, plusieurs esquisses, dessins et maquettes sont consacrés aux vitraux du temple de Coppet dont deux sont dédiés à cette fenêtre consacrée à Adam et Eve (CHC_045 et CHC_046). Il est très instructif de les étudier afin de voir comment le sujet a évolué. Il semble que Clément ait rapidement fixé les deux épisodes liés à Adam et Eve, à l’exception de petits détails qui ont changés. Par contre, l’illustration dans le quadrilobe de la partie supérieure du vitrail semble avoir donné plus de peine à l’artiste. Deux variantes très différentes ont été présentées dans les maquettes mais aucune d’entre elles n’a été retenue pour le carton qui propose une troisième solution. Pour l’esquisse CHC_045, Adam et Eve, debout côte à côte, sont figurés sur le lobe supérieur et l’agneau et le lion sont à leurs pieds dans les lobes gauche et droit. Dans le dessin CHC_046, c’est le pommier qui prend place dans le lobe supérieur avec Adam et Eve assis de chaque côté de celui-ci. Seul l’agneau, couché, figure dans le lobe inférieur. Sur le projet définitif, Adam et Eve ont disparus au profit d’une grande gerbe de fleurs et le vol de trois canards, le lion et l’agneau étant couchés dans le lobe inférieur.
Charles Clément réalise les vitraux pour le temple de Coppet en deux phases. Il est appelé une première fois pour les vitraux du choeur (Crucifixion et les deux verrières d’évangélistes) entre 1933 et 1934, qu’il réalise en collaboration avec l’atelier fribourgeois Kirsch et Fleckner. Vingt ans plus tard, en 1953-1955, il réalise avec l’atelier Kirsch frères les vitraux pour la nef et la façade occidentale.
En 1933, il est de retour en Suisse depuis une année après cinq ans passés à Paris et Marseille et continue son activité liée au vitrail (Rouiller, 1989, p. 199-200) commencée dix ans auparavant avec des verrières pour le temple d'Arnex (1922) (Courthiau, 2011, p. 327). Alors qu’il débute son travail pour les verrières du temple de Coppet, il est en train de terminer celui pour la cathédrale de Lausanne. Il y a réalisé quinze vitraux entre 1930 et 1934. Il vient également de terminer la grande verrière du choeur pour l’église de la commune voisine de Coppet, Commugny (1933), et va s’occuper de la création des vitraux pour le temple de Cuarnens (1935) (Rouiller, 1989, p. 205).
Lorsqu’il commence la seconde phase de sa création à Coppet, Clément s’occupe en même temps de la réalisation de cinq vitraux pour l’église de Crêt-Bérard à Puidoux et de quatre verrières pour l’église réformée de Goumoens-la-Ville (1953). En juin 1954, le vitrail du Christ Roi pour l’église Saint-Luc à Lausanne est inauguré (Rouiller, 1989, p. 205).
Entre ces deux époques le style de Clément a évolué. Pour les trois verrières du choeur, l’artiste compose un dessin avec une multitude de pièces de verres très petites et modèle ses personnages dans un style cubiste. Vingt ans plus tard, il simplifie ses motifs, agrandit les verres et va à l’essentiel. Son travail sur la couleur semble suivre le même chemin. Alors qu’il juxtapose une multitude de couleurs dans ses premières verrières, parfois se contrastant fortement, il préfère l’harmonie des teintes dans cette seconde phase créative. La verrière du Jugement dernier en est un parfait exemple. Composée dans une déclinaison allant du lie de vin au mauve, l’impression générale est harmonieuse et paisible alors que le vitrail consacré à la Crucifixion dégage une impression d’hétérogénéité qui fait néanmoins toute la force de la verrière.
Datation
1954
Date d'entrée
23.12.1991
Donateur·trice / Vendeur·euse
Propriétaire
Propriétaire précédent·e